Noël 2O18
Château d’Argent
Réflexions
Le Massacre des Innocents
Un prêtre, le Père Patrick Desbois, spécialiste de la question juive, et descendant de déporté, a mené une enquête sur les Juifs de l’Est, assassinés par les nazis durant la deuxième guerre mondiale.
Deux millions sept cent mille juifs ont disparu entre 194O et 1944 en Ukraine.
A Bilatserkva, au sud de Kiev, un témoin raconte :
« Je suis allé seul dans les bois. La Wehrmacht avait déjà creusé une tombe. On a amené les enfants juifs dans une remorque tirée par un tracteur. Les Ukrainiens attendaient en tremblant. On a descendu les enfants de la remorque. On les a alignés le long de la tombe de sorte qu’ils tombent dedans quand on les fusillerait. On n’a visé aucun endroit du corps en particulier. Les enfants sont tombés dans la fosse. Leurs vagissements étaient indescriptibles. Je n’oublierai jamais cette scène de toute ma vie. Je me souviens surtout d’une petite fille blonde qui m’a pris par la main. Elle aussi a été tuée plus tard. La tombe était près d’un bois. L’exécution a dû avoir lieu vers trois heures et demie ou quatre heures. Beaucoup d’enfants ont reçu quatre
ou cinq balles avant de mourir » . ( Patrick Desbois, Porteur de mémoires éd.Michel Lafon, 2OO7 et Flammarion, 2OO9 , p. 72-73.)
Ce témoignage me fait penser à un autre massacre d’innocents : celui des enfants ordonné par
Hérode (Mt 2/16-18), après la naissance de Jésus.
Et il me fait penser encore à tous les animaux innocents qui seront tués pour que les humains puissent célébrer leurs fêtes.
Tuer. Des enfants juifs, parce que, dit le Gauleiter, « ce seront les ennemis de demain » (op.cit. p. 72).
Tuer des enfants à Bethléem, parce que, parmi eux, pourrait se trouver un rival d’Hérode.
Tuer des animaux, le chevreuil, le lièvre, la dinde de Noël, le chapon, et tous les autres : pourquoi ? Parce que c’est la coutume, parce qu’il y a la gourmandise, comme s’il n’y avait rien d’autre à manger sur terre. Et parce qu’on ne pense qu’à son plaisir.
La haine, la jalousie, l’égoïsme, dans ces trois exemples, conduisent à tuer.
Et c’est justement de cela que le message de la naissance du Christ veut nous délivrer.
Le massacre des innocents peut prendre beaucoup de formes. Le meurtre des animaux n’a pas sa place dans la fête de Noël. Il n’a pas sa place dans l’existence humaine, dont la mission est de leur « donner un nom » ( Gen 2/19-2O), c'est-à-dire une identité et un droit sacré à la vie.
Le fil directeur de la vocation de l’homme a toujours été, mais aujourd’hui tout particulièrement, le respect de la vie : « Ehrfurcht vor dem Leben » (Albert Schweitzer).
Danielle Vincent.
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