Musée du Chateau d'Argent

Journal août 2022

 Mensuel du Château dArgent - N° 42 - Août 2022

SIGMUND FREUD: TOTEM ET TABOU (1913). 

Totem et Tabou, écrit en 1912-1913,  a été édité dans les Œuvres complètes de Sigmund Freud, par les Presses universitaires de France,  volume XI,  p. 189 – 385  en traduction française  (1998 et 2018) ;  il a aussi été publié en français  par les éditions Flammarion en 2015.
 
Cette étude, très originale, se présente en quatre parties:
1)  La crainte de l’inceste.
2)  Le tabou et l’ambivalence des sentiments.
3)  Animisme, magie, et toute-puissance des pensées.
4)  Le retour infantile du totémisme.
 
On peut relire mainte fois cet ouvrage sans en être convaincu.  Il apparaît volontiers comme une hypothèse ou même un  fantasme. Freud en est bien conscient  ( 1 ).
Mais c’est pourtant sur lui que repose tout  l’édifice de sa pensée.
 
Freud part d’études archéologiques et sociologiques sur les peuples primitifs  ( 2 )  et  en conclut que  les phénomènes  de Totem et de Tabou régissent depuis toujours la condition humaine.
Le Tabou est un interdit.  Il peut être un  objet, un animal, un homme, une divinité, ou bien une action ou même une intention.
Le Totem est ce qui est vénéré. Le Totem est par principe entouré d’interdit, donc est tabou. Il peut être lui aussi objet, animal, homme, divinité, action ou pensée.
Totem et Tabou sont liés :  une action, un être, une chose  sont  tabou par rapport à un totem.
Totem et Tabou sont sources de culpabilité et d’autopunition conséquente :  avoir enfreint un tabou ou s’être mal conduit envers un totem par désobéissance, profanation, blasphème, sont des actions coupables.
 
A l’origine, ce qui était vénéré était avant tout le père du clan familial.
Mais un facteur psychologique intervient dans cette société et la détruit :  c’est la jalousie  de la fratrie contre le patriarche et la volonté des frères de s’emparer aussi bien du pouvoir que des biens paternels :  avant tout de l’élément féminin qui entoure le père.  C’est le complexe d’Œdipe, déjà présent à l’état de désir dans l’enfant mâle,  avec deux autres pulsions : la pulsion de meurtre et de cannibalisme.  A l’adolescence, ces pulsions sont, dans la tribu primitive, passées à l’acte :  les fils tuent le père et le dévorent.  Freud ne parle pas d’un seul fils, comme dans le  mythe d’Œdipe, mais de l’ensemble de la fratrie  ( 3 ).
 
Ce meurtre est destiné à éviter la castration  que les fils redoutent de la part du père, et à s’approprier la mère, les autres femmes de  la famille et peut-être aussi les sœurs, mais Freud ne le précise pas.  La crainte de la castration est une composante du complexe d’oedipe :  elle est d’une importance capitale dans la vie affective de l’homme au point que Freud peut écrire que « le jeune homme fixé à son père par le complexe de castration, devient inapte à l’amour pour la femme »   ( 4 )   
Voilà donc l’inceste constitué.
Il est suivi par la consommation de la chair du père, dans le but de s’approprier sa force.
 
Cependant, cet acte, comme le sentiment de haine qui l’a suscité, est ambigu. Aucun sentiment n’est pur, aucun acte totalement clair, pour Freud. Ils sont toujours ambivalents.  Le sentiment de haine pour le père se doublait aussi, chez les frères, d’un sentiment d’affection et d’estime. 
 
Et c’est, après le meurtre du père, que le sentiment d’estime et d’affection   refait surface. Les fils sont pris de remords de l’avoir tué   ( 5 ) 
 
 Cette thèse permet d’aller ensuite dans plusieurs directions :
1 – D’abord, le père prend ainsi sa revanche :  il continue à dominer, et à vivre dans l’esprit de ses fils.
 
2 – Le remords entraîne un sentiment de culpabilité qui ne s’éteindra jamais et va peser de génération en génération sur l’espèce humaine.
 
3 -  Ce sentiment de culpabilité appelle inconsciemment un besoin de punition, d’expiation  et de pardon.
Ceci se passe aussi bien  individuellement que collectivement :  des peuples tuent leur roi, figure du père, pour s’approprier sa puissance  et ses biens : ce sera la démocratie.  Ces peuples en conçoivent du remords et se forgent ensuite, inconsciemment, des attitudes d’autopunition, des névroses collectives d’échec et d’autodestruction, prenant la forme de crises, d’erreurs et de conflits  divers.
 
4 -  Cette culpabilité ressentie crée la religion destinée à dispenser l’absolution.
Mais l’absolution passe d’abord par un  paiement de la dette, un dédommagement pour la faute commise, un sacrifice.
 
5 – Le sacrifice est offert à ce qui prend la forme du père :  le dieu, c’est à dire  le totem.
Aux yeux de l’enfant, l’image du père, était  dès l’origine, une figure divine :  toute-puissante, mystérieuse,  bienfaisante et menaçante à la fois.  C’est le psychisme qui crée le dieu à l’image du père.
 
6 -  Le sentiment de culpabilité de l’homme le pousse à chercher des substituts au père, afin de ne plus être obligé de le tuer, lui. On tue alors le père au moyen d’un remplaçant.  Ainsi,  le totem peut prendre encore d’autres visages que le père ou le dieu : il peut être, dans les peuplades primitives,  un animal vénéré, et qu’il est interdit de tuer sauf dans des cérémonies spéciales destinées à symboliser le meurtre du père.  Alors l’animal prend la place du père. Il est sacrifié et aussi consommé.  En  se nourrissant de sa chair et de son sang, on s’approprie sa force et sa vie.  L’ambivalence des sentiments de manifeste ici :  l’animal-totem est sacralisé mais il est aussi dévoré. 
 
7 -  L’animal peut aussi servir de victime sacrificielle et expiatoire :  il est offert par l’homme en sacrifice à la divinité pour apaiser sa colère,  acheter sa bienveillance et solder la faute originelle du parricide.  ( 6 )
Tous les peuples  ( Freud parle surtout des peuplades primitives,  mais laisse deviner que ces pratiques ont perduré dans les religions ultérieures et actuelles ) pratiquent des offrandes sacrificielles sous une forme ou sous une autre.
 
8 - L’offrande peut être profane : on peut s’offrir soi-même, ou ses biens ;  ou être elle-même sacrée : alors le dieu ou le totem  (le père, en réalité)  est offert en sacrifice sous la forme d’un animal sacré,  au cours d’un repas sacré  ( 7 )  
Il arrive aussi  que le totem lui-même, le dieu, s’offre en sacrifice, ce qui déculpabilise alors totalement l’homme :  le tribut offert est tel, qu’il est  en mesure de compenser l’ampleur de la faute commise et toujours renouvelée au cours des générations.  Que, dans son subconscient, l’humanité ait pu produire une compensation de ce genre, allant jusqu’à nécessiter le sacrifice de la divinité elle-même,  voilà qui témoigne de l’ importance de son sentiment de culpabilité.
 
9 -  Le meurtre du père, enfin, produit un sursaut moral dans la société primitive :  cette dernière  prend conscience que l’inceste va détruire cette société en suscitant des meurtres en chaîne.
La première disposition à prendre est alors d’interdire l’inceste. 
Cette interdiction de l’inceste est la première répression, le premier tabou auquel sera confronté l’être humain dès sa prime enfance.  Elle constitue aussi le plus douloureux renoncement affectif,   qui deviendra la source de tous les conflits ou névroses, aussi bien infantiles que plus tardifs  ( 8 )  
 
C’est donc dans ce complexe d’Œdipe qu’il faut  chercher l’origine des interdits, des tabous :  celui de l’inceste et du meurtre.  C’est là aussi la racine de la culpabilité, de l’autopunition, et des comportements religieux, sacrificiels individuels ou collectifs  ( 9 ).
 
 Totem et Tabou apparaît en 1913, à la veille de la première guerre mondiale, dans une atmosphère aigüe de militarisme. Et cette guerre, curieusement, a eu pour déclencheur l’assassinat d’un couple royal, avec les conséquences que nous  identifions maintenant, après avoir lu Totem et Tabou :  les luttes fratricides,  les sacrifices des batailles, les amputations des traités,  et le pire qui allait venir :  l’autopunition inconsciente des peuples par la seconde guerre mondiale.
 
On se demande ce que vient faire dans cet ouvrage, le chapitre trois, sur l’animisme et la magie.  Mais il est intéressant,  parce qu’il  s’inspire des importants travaux de James George Frazer, qui paraissent dans le Rameau d’Or, en ces années 1910 à 1913  et explorent le     totémisme (1910)  et  la spiritualité des Primitifs.  Freud va en tirer des enseignements pour la psychanalyse. 
 
L’animalisme  est une doctrine qui  croit aux  esprits  animant la nature.
Il faut en parler quand on évoque l’histoire des groupes primitifs, car ils avaient une conception particulière de la nature et du monde.
 Nos ancêtres étaient persuadés que la nature et le monde en général étaient  remplis d’esprits, d’êtres spirituels bienveillants ou malveillants.  Les animaux, ou les choses que nous considérons comme inanimées :  plantes, roches,  montagnes,  étaient à leurs yeux, animées par des esprits ; les pierres vivaient.  Ces esprits pouvaient aussi habiter les hommes.  Freud, homme de sciences, tellement sceptique à l’égard des religions, accorde pourtant ici un intérêt particulier à ces croyances anciennes,  au surnaturel et à l’invisible.
« Les personnes  humaines contiennent des âmes qui quittent leur séjour et peuvent migrer dans d’autres hommes.  Ces âmes sont, jusqu’à un certain degré,  indépendantes des corps et peuvent migrer dans d’autres corps »  ( 10 ).
Ces âmes, pour le primitif, sont immortelles :  « Pour le primitif, la perpétuation de la vie…est chose évidente »  ( 11 ).  
Il faut remarquer que  « les mêmes représentations des âmes se sont montrées concordantes chez les peuples les plus divers et à toutes les époques »  ( 12 ).
Ce sont ces représentations qui sont à l’origine de la pensée dualiste (âme – corps) et des mythes religieux  ( 13 ). 
Ce qui est intéressant, ici, c’est de voir que les hommes  des cavernes, avaient une vision spirituelle, surnaturelle du monde, et n’étaient absolument pas les barbares que nous pensons voir en eux.  Ils  avaient probablement une spiritualité bien plus élevée que la nôtre.
 
L’animisme pensait que ces esprits animant la nature, régissent le monde dans son ensemble :  « Il permet de concevoir, à partir d’un seul point, la totalité du monde comme un ensemble cohérent »  ( 14 ).
Le système de pensée animiste a pour effet de se rendre maître des hommes, des animaux et des choses par l’enchantement et la magie.
L’enchantement  est l’art d’influencer les esprits par une méthode psychologique.
La magie  est une technique visant à soumette les phénomènes naturels à la volonté de l’homme.
Une des techniques de la magie est de travailler sur une effigie : il advient alors à l’original ce qu’on a fait subir à sa représentation.
Parmi les innombrables actions magiques, Freud veut surtout retenir  celles qui concernent la pluie et la fertilité.
Ce qui est efficace dans tous les actes magiques, c’est la ressemblance  entre l’action accomplie et le résultat espéré.  Ainsi, créer une apparence de pluie suscite le phénomène de la pluie.
On peut aussi agir sur l’appartenance,  c'est-à-dire sur une partie de ce qui vous appartient : le corps ou les biens :  cheveux, ongles, vêtements ; et cela de manière hostile ou bienveillante.
Ainsi,  et nous revenons au cannibalisme originel, par la consommation d’une partie du corps ou du totem dans son ensemble, on s’approprie les vertus de la personne sacrifiée.  ( 15 ).
La force motrice de la magie, ce sont les désirs humains :  « L’homme primitif a  une formidable confiance dans le pouvoir de ses désirs »  ( 16 ).
Déjà l’enfant essaie de réaliser ses désirs  de manière hallucinatoire, en jouant et en fantasmant ce qu’il souhaite.  La « représentation du désir insatisfait » est commune à l’enfant et au  primitif.  Ils sont l’un et l’autre persuadés que les choses cèdent le pas aux représentations qu’on en a.  « Comme la pensée ne connaît pas de distances… le monde magique, par télépathie, surmontera lui aussi la distance dans l’espace et traitera un contexte d’autrefois comme un contexte présent »  ( 17 ).
Le monde intérieur de la croyance animiste  reflète le monde que nous voyons présentement.  L’animisme part du principe de la toute-puissance des pensées.
 
Voici une piste précieuse pour la psychanalyse.
« C’est dans la névrose de contrainte que la persistance de la toute-puissance des pensées est la plus nette »  ( 18 ).
Ce qui est déterminant dans la névrose, n’est pas ce que l’on vit  - la réalité -   mais ce que l’on pense  ( 19 ).  Ainsi, les symptômes de l’hystérique répètent et fixent des choses de son imagination.  Les névrosés ont une conscience de culpabilité qui ne correspond à aucun acte réel qu’ils auraient commis :  « Un névrosé de contrainte peut être oppressé par une conscience de culpabilité qui conviendrait à l’auteur d’un meurtre de masse »  ( 20 ).   Ainsi, « La toute-puissance des pensées, la surestimation du processus de l’âme par rapport à la réalité, se révèlent d’une efficacité illimitée dans la vie affective du névrosé et dans toutes les conséquences qui en découlent »  ( 21 ).   Ces conséquences peuvent être, comme dans la paranoïa, des déplacements :  le malade déplace ses conflits et sa haine sur d’autres personnes, comme pour s’en débarrasser  ( 22 ).
Ainsi le névrosé est proche de l’homme primitif qui s’imagine pouvoir agir sur les circonstances par la force de sa seule pensée.
Il faut dire que, plus précisément, les actions des névrosés sont des « contre-enchantements »
destinées à empêcher le malheur et à se défendre surtout contre la mort.  L’attente du malheur et de la mort est la caractéristique et le contenu de la névrose  ( 23 ).
Ces actions de protection s’effectuent par des déplacements,  des actes symboliques  qui, à la fois, figurent et travestissent la pulsion :  tuer et  dévorer le père,  mettre à mort et consommer le dieu :  cela s’effectue en tuant et en mangeant un animal, ou un aliment  qui figure le totem ou le dieu.  Comme on le voit, on est déjà là dans le rite eucharistique de la religion chrétienne.
 
Freud pense que la phase animiste a été,  en effet, suivie par la phase religieuse, et que cette dernière sera tout entière relayée par la phase scientifique ( 24 ).   Dans la troisième phase, scientifique,  l’homme va redevenir humble, et se soumettra à la mort,  ainsi qu’à toutes les nécessités de la nature.  Or, il nous semble qu’aujourd’hui, au contraire, les progrès scientifiques stimulent  l’orgueil humain,  jusqu’à  vouloir un jour dominer la nature et même la mort.   Cette constatation, nous pouvons la faire plus d’un siècle après la parution de Totem et Tabou.
Pourtant, dit-il, il y a un domaine de la culture où  s’est maintenue la toute-puissance de la pensée : c’est celui de l’art. Par son art, l’artiste accomplit ses désirs et exprime tout ce qui peuple son inconscient.
 
L’auteur poursuit et termine ce chapitre par une illustration de son expérience médicale sur des névrosés, et notamment l’interprétation de leurs rêves.   Partant de là, il est persuadé que l’angoisse, le  fantasme, le démon, la superstition, tous ces paravents contre la connaissance, pourront être dissipés par la recherche psychanalytique,  donc par la science :  « La peur, le rêve, le démon, la superstition sont des concepts psychologiques provisoires qui se sont dissipés devant la recherche psychanalytique »  ( 25 ).
 
D.V.       
 
N O T E S : 
 
( 1 )     Il avoue que c’est une audace :  « Nous laissons la conscience de culpabilité entraînée par un acte se perpétuer durant de nombreux millénaires et conserver ses effets sur des générations qui ne pouvaient rien savoir de cet acte »  (Totem et tabou, éd. Flammarion, Paris, 2015, p. 266).  L’auteur est obligé de poser l’hypothèse d’une  « psyché de masse »  pour expliquer la continuité du processus  meurtre – culpabilité – rachat.  La disparition des individus n’interrompt pas  la persistance de ce phénomène.  Il y a un héritage des dispositions psychiques d’une génération à l’autre.   Ceci se produit parce que tout homme a le moyen de comprendre inconsciemment les réactions des autres  (p. 268), donc de comprendre spontanément toutes les coutumes, cérémonies et lois que l’acte meurtrier originel envers le père a suscitées.  Et conséquemment, la conscience de culpabilité afférente, ne s’est jamais éteinte  (ibid.).
 
( 2 )  Les études de :
James Atkinson:        Primal Law  (1903).
Johann Bachofen:      Das Mutterrecht  (1861).
Robert Codrington:   The Melanesians  (1891).
John Frazer :            The Aborigenes of New South Wales   (1892).
James Frazer:           Totemism and Exogamy (1910).
                               The Golden Bough  (1911) :    t. I   -   The Magic Art and the Evolution of Kings.
  1. II  -    Taboo and the Perils of the Soul.
                                                                   (1914) :    t. IV-   Adonis, Attis, Osiris.
                                                                   (1912) :    t. V -   Spirits of the Corn and of the Wild.
Frank  Jevons:            An Introduction to the History of Religions  (1896).
Robertson Smith :       Lectures on the Religion of the Semites   (1894).
Wilhelm Wundt :        Mythus  und Religion  (1906),  dans :  Völkerpsychologie,  t. II.
 
( 3 )     Le mythe de Caïn et d’Abel  raconte un fratricide,  mais la faute originelle n’est pas celle-là :  dans la Bible, la faute originelle et héréditaire est la  remise en question d’un ordre divin :  « Dieu a-t-il vraiment dit… ? ».  Pour Freud, c’est le meurtre du père qui constitue la faute originelle ; elle est transmise de génération en génération par la présence, dans le psychisme humain, des pulsions d’inceste, de meurtre et de cannibalisme. 
 
( 4 )    S.Freud :  L’Inquiétant,  1919.  Œuvres complètes, P.U.F.  vol. XV,  p. 166.  Voir encore ci-dessous,  note  23.  
 
( 5 )      Dans le mythe de Caïn,  c’est la peur et non le remords qui poursuit le meurtrier. Cependant le meurtre du frère est aussi une composante du complexe d’Œdipe :  l’ainé est jaloux du frère plus jeune qui reçoit une plus grande affection de la mère, ce qu’il ressent comme une privation. Cela peut valoir aussi pour une sœur, comme on le voit dans :  Le petit Hans, qui voudrait tellement la mort de sa petite sœur  (S. Freud :  Œuvres complètes, vol. IX, PUF 1998/1, 2016/3, p. 9-10).
 
( 6 )       p. 259.
 
( 7 )     Ici se pose la question de savoir pourquoi, lors de la Cène chrétienne, c’est le pain et non la viande de l’agneau pascal qui est consommé ? La réponse se trouve sans doute en relation avec le culte de Mithra qu’il s’agissait, pour le Chrétiens, de concurrencer :  du flanc du taureau, tué par Mithra, était sorti du blé et du vin. cf  p. 261. 
 
( 8 )     p. 265 :  « Le complexe d’Œdipe forme le noyau de toutes les névroses ». Voir : Le Malaise dans la Culture, p. 124 – La Voix… n° 40, p. 5 :  « L’interdit de choix de l’objet incestueux est peut-être la mutilation la plus décisive que la vie amoureuse des hommes ait subie au cours des âges ».
 
( 9 )      La guerre  doit être assimilée  à de l’autopunition :  Le  Malaise dans la Culture, p. 152 – La Voix… n° 40, p. 8.
 
(10)      p. 162.
 
(11)      p. 163.
 
(12)      p. 164.
 
(13)      p. 165.
 
(14)      p. 164.
 
(15)     Freud s’inspire ici de l’étude de  James Frazer :  The Magic Art  (1911),  qui parle de la magie imitative et de la magie contagieuse.
 
(16)      p. 172.
 
(17)      p. 174.
 
(18)      p. 175.  Une névrose de contrainte est un conflit apparaissant à la suite d’une contrariété, d’un obstacle à un désir ou à une pulsion.  C’est « la pression d’une sur-morale »  (p. 270) .  « Les êtres humains tombent malades de névroses par suite du refusement (sic). C’est du refusement de la satisfaction de leurs souhaits libidineux qu’il s’agit (…).  Pour qu’apparaisse la névrose, il faut un conflit entre les souhaits libidineux d’un être humain et cette part de son être que nous appelons son moi, qui est l’expression de ses pulsions d’autoconservation et inclut ses idéaux quant à son être propre. Un tel conflit pathogène ne se produit que si la libido  (le désir, la pulsion, ndlr.)  veut se lancer sur des voies et vers des buts qui sont depuis longtemps surmontés et proscrits par le moi, que celui-ci a interdits à tout jamais (…). Ainsi la privation, le refusement d’une satisfaction réelle, devient la première condition de l’apparition de la névrose »  (S. Freud : Quelques types de caractère dégagés par le travail psychanalytique, 1916, éd. PUF  vol. XV, p.  20-21).
 
(19)      Totem et Tabou, op. cit.  p.  176.
 
(20)      p. 176.
 
(21)      p. 176.
 
(22)      p. 183.
 
(23)      p. 177.  « Une fois l’état  d’angoisse instauré, l’angoisse absorbe toutes les autres sensations (…) et tous les affects peuvent se transformer en angoisse »  (S. Freud :  Analyse de la phobie d’un garçon de cinq ans, ou Le Petit Hans,  19O8.  Ed. PUF, vol. IX, p. 30).
 
L’angoisse est décuplée par la menace de castration. Ce thème est   apparent cinq ans avant Totem et Tabou,  dans l’étude sur le Petit Hans, citée ci-dessus.  Le complexe d’Œdipe est corroboré par le complexe de castration.  L’enfant a une peur panique d’être puni de ses désirs envers la mère par l’agression de son père contre sa  virilité.  Freud en tire même des conclusions sociologiques en écrivant que  le complexe de castration est la plus profonde racine inconsciente de l’antisémitisme.  En effet,  très vite, l’enfant est persuadé que,  par la circoncision,  le Juif est inférieur à lui  et  qu’il peut donc le mépriser.   De même,  la misogynie  a comme racine inconsciente le sentiment de supériorité de l’homme  dû  à sa constitution génitale :  c’est même,  pour Freud,  la raison majeure du mépris masculin envers la femme  (op.cit.  p. 31).
Ainsi, l’enfant est puni de triple façon :  par le barrage conventionnel le séparant de  la mère, par la menace de castration émanant du père,  et par la crainte que la mère ne veuille plus de lui à cause de son infériorité sexuelle par rapport au père  (op.cit. p. 34).  De ce nœud gordien naissent,  pour Freud,  toutes les névroses.
 
Nous avons pu tirer de cela quelques réflexions  et essais de solutions à deux problèmes posés déjà dans ces mensuels :  le cas d’Adolf Hitler, et celui d’Albert Schweitzer.
Hitler avait été génitalement handicapé par une grave blessure de guerre. Il en a conçu un sentiment d’infériorité  dont l’histoire allait pouvoir mesurer l’ampleur.   Cela avait débuté par une haine vis-à-vis des Communistes, en apparence parce qu’ils  avaient contribué à la défaite de l’Allemagne, mais en réalité parce qu’ils étaient Juifs,  et qu’il se sentait rabaissé génitalement au niveau de ces circoncis, comme nous l’avons montré plus haut, avec l’histoire du Petit Hans.  Il a  compensé par une surenchère maladive de virilité,  de militarisme, de rivalités et de tentatives de domination.   Son amour pour sa mère,  très prononcé dans sa jeunesse, et sa  rivalité haineuse vis-à-vis de son père,  ont été  transférés  sur la mère- patrie et les nations  rivales, ennemies.    On peut dire que toute sa vie, Hitler a cherché à  retrouver sa virilité et aussi sa mère, par le truchement de son action  contre les ennemis de son pays.    Ainsi, ce complexe d’Œdipe assorti du complexe de castration, peut prendre des proportions gigantesques  et la névrose devient la plus dangereuse des maladies.
 
Chez Albert Schweitzer, l’Œdipe avait manifestement été contrarié par sa mère elle-même, dont il déplorait la froideur, ainsi que par la  rigueur morale du milieu pastoral protestant où il  évoluait.  Il avait reporté ses désirs oedipiens sur la bonne  qui,  parfois,  lui faisait une légère caresse  de ses mains gantées.  Il avait été ému par ces gants blancs en filet, et avait  fait une fixation érotique là-dessus ;  mais ces gants en filet étaient un grillage, un barrage.  Sans doute, le jeune Albert en avait-il été extrêmement  culpabilisé.   Nous avons cherché à savoir ce que notre héros avait donc à expier, pour s’orienter inconsciemment vers une vie d’enfer  (cf  La  Voix… n°  40, note  62, et conférence sur les Sermons d’A.Schweitzer,  La Voix… n° 17, p. 2).  On trouve, par Freud, l’élément de réponse.
 
(24)      p. 178.
 
(25)      p. 189.
 
L  A      P  H  R  A  S  E      D  U      M  O  I  S  :
 
« Au fondement de la conscience de culpabilité des névrosés, il n’y a que des réalités psychiques,  non pas des réalités factuelles . »
 
                                                                           Totem et Tabou,  op.cit. p. 268.
 
  
                                                                                       Château d’Argent :   transmettre le savoir.
                                                                                                

 

 La Voix dans le Désert.  Mensuel gratuit du Château d’Argent
Directrice de publication :  Danielle Vincent.
Editions du Château d’Argent,  185 rue de Lattre de Tassigny, 68160 Ste Marie-aux-Mines.
Mise en page et impression :  ZAPA Informatique.
ISSN :  2650 – 67225.
Dépôt légal :   3e trimestre 2022.